Vibrations:
L'arrachement de la Figure au figuratif est une des bases de la démarche sculpturale et picturale de Maurizio Del Piano. Et pourtant nous apercevons un pied, une tête, un buste parmi ces oeuvres. Mais au buste, à la tête, au pied s'est substitué le surgissement d'une Figure dont la présence organique nous saisit parce qu'elle n'a pas d'autre signification dans un premier temps que cette masse striée de lamelles superposées traversées par la lumière.
Et c'est par ce chemin unique de la matérialité et de la vision conjuguées qu'elles font sens, que les extrêmes se rejoignent, force imposante et ultime fragilité.

De même la danse conjuguée du métal et du verre érige vers le ciel leur dualité paradoxale. De même la roche trouée par les lames de verre vient nous frapper au vif dans leur minéralité et ces oeuvres nous font ainsi passer du mode de la représentation à celui de la révélation. Une connotation religieuse émane de ce mot. Mais elle sied parfaitement au travail présenté. En effet Maurizio Del Piano relie ses rhizomes, ses fibres personnelles à l'espace cosmique.

Toutes choses s'interpénètrent, s'enrichissent mutuellement dans un mouvement d'où émergent des lignes de fuite. " Les concepts sans intuition sont vides et les intuitions sans concept sont aveugles " écrivait Kant. Maurizio Del Piano réussit cette difficile jonction. Où réside donc sa métaphysique de la matière ? Il dépasse la dualité des matériaux qui s'entrechoquent, celle aussi du tactile et de l'optique, du flux et du statique pour créer un troisième lieu, une nouvelle clarté qui les transcendent. Ce troisième oeil, " cet oeil haptique " dont parlait G. Deleuze dans F. Bacon, Logique de la sensation, nous sommes invités à y entrer pour retrouver un mouvement où se conjuguent densité, légèreté et liberté du sens.

Nicole Deleu