La dernière bande

Dans ce monologue Krapp, écrivain raté, clochardisé, et alcoolisé, soliloque, en réécoutant chaque année, une bande magnétique enregistrée 30 ans plus tôt par lui-même, qui parle entre autres, du décès de sa mère, de son échec en tant qu'artiste, mais essentiellement d'une histoire d'amour avortée qui est suivie d'une rupture dont il ne s'est jamais remis. Histoire d'amour idéalisée ? Fantasmée ?

"Au-delà de la dimension absurde et poétique toujours présente chez Beckett, ce qui m'intéresse particulièrement dans la mise en scène de cette pièce, et que nous tâcherons de mettre en lumière, avec Jean-Charles Rousseau Rieznikoff qui interprète Krapp, c'est la peinture de la désespérance amoureuse pathétique et douloureuse. Krapp est totalement immergé dans sa névrose.

Cette désespérance amoureuse s'exprime par un comportement monomaniaque, obsessionnel, répétitif et délirant, accentué par un état d'ébriété avancé du personnage, nous conduisant souvent sur un terrain potentiellement burlesque typiquement beckettien.

Krapp se raccroche à ce récit avec nostalgie, (sa seule raison de vivre ?), le réécoute avec un plaisir complaisant, et pousse " sa folie " jusqu'à s'en prendre parfois violemment à l'homme qu'il était 30 ans auparavant.

Même teintée d'ironie, de burlesque et de désespérance, il y a dans ce souvenir amoureux un certain romantisme, du lyrisme même parfois, et c'est tout à fait singulier dans l'oeuvre de Beckett.

Krapp devient un personnage profondément attachant et pathétique... et c'est en ce sens aussi qu'il est un héros beckettien."