Targuiya, une jeune touareg de dix-sept ans condamnée à l'exil par les siens pour avoir donné naissance à un enfant sans nom, aux prises avec cette guerre qui lui a tout enlevé, en arrive à oublier qui elle est, la raison de sa présence en ce monde. La mystérieuse Houriya l'accompagne dans son errance intérieure, la guide sur ce chemin de mémoire.

Ce long cheminement fonctionne sur le modèle des caravanes touarègues : de puits en puits jusqu'à la dernière étape du périple : la solitude.

" Targuiya : Quel péché ai-je donc commis ? Je me souviens encore des regards qui se détournent et des doigts qui accusent. J'entends l'ultime sentence et je revois notre longue errance... Houriya, toi qui sais lire dans le sable, dis-moi qui est cet enfant et pourquoi nous sommes ici, seules et abandonnées.

Houriya : Le vent a effacé du sable la mémoire du temps. Mais l'enfant est là, Targuiya. Il ne tient qu'à toi de parler pour lui donner un nom... Qu'allons-nous faire d'un enfant sans nom. Parle et ce sera peut-être la fin de notre longue errance.

Targuiya : Que faut-il que je dise... et que voulaient-ils savoir ? Dans ma mémoire, il n'y a de place que pour des rêves de soleils étranglés et des échos de lumière morte. Le passé ? Un miroir brisé dont ma mémoire ne retient que les débris de sa propre détresse...

Houriya : Viens, approche donc, donne-moi la main et laisse-moi t'aider.

Targuiya : Non ! Car dans ton coeur aussi, Houriya, je lis cette même détresse. Je comprends à présent pourquoi ils t'ont attachée à mes pas et pourquoi nous avons marché si longtemps, jusqu'à ce puits maudit. Alors finissons-en... Dire que je croyais avoir à mes côtés une nourrice pour mon enfant... J'oubliais que tu étais aussi laveuse de morts et gardienne des secrets de famille. Les secrets honteux, comme cet enfant, que l'on jette sans regret dans un puits abandonné... "