Don Juan de Molière

Don juan regarde... Autour de lui, palpite le monde.
Autour de lui, ça vit, dans tous les sens : ça aime, ça combat, ça chante, ça croit, ça rit, ça hait, ça bouffonne !

Un ballet drôlatique où tour à tour, vers cet homme immobile qui semble moins mener le jeu que le subir, montent la colère, le dépit, la rage et les menaces... Mais rien de tout cela ne paraît l'atteindre. Au contraire, à son contact, la réalité perd son sérieux, sa consistance. Face à Don Juan, les autres ne sont plus que pantins agités par les passions qu'il suscite. Alors, le monde qui l'entoure devient pour lui un spectacle de marionnettes, dont il joue, rit et se lasse tout aussi vite.

Car lui ne ressent rien, ou par moments seulement, éphémère lueur, s'anime à la flamme de l'amour — qu'un rien suffit à éteindre. Paradoxe pour celui auprès de qui tout s'embrase : Don Juan séduit, fait naître l'amour, la crainte, la jalousie, l'envie, la colère, mais aucune de ces passions ne l'habite. Il suscite la vie mais semble en être absent.

C'est alors que la perspective se renverse : ce ne sont plus les autres, si vivants, qui sont les marionnettes, mais lui, l'homme sans âme. Fascinante créature entre les mains de son serviteur. Ce Sganarelle double de Molière, hésitant entre l'effroi et la complaisance face à celui qui n'est ni tout à fait un homme ni vraiment un monstre, mais qui à coup sûr échappe à son créateur.

Formés au sein du Théâtre de l'Épée de Bois (Cartoucherie), les fondateurs de la compagnie, Alexandre Palma Salas et Milena Vlach, ont fait leurs armes sur les tréteaux. Nourris de pratiques anciennes comme le théâtre Élisabéthain, la Commedia dell'arte ou même le théâtre Baroque, ils ont à coeur de défendre un art exigeant et populaire, complice du public. Un théâtre s'inscrivant dans la lignée des spectacles sur tréteaux, conçus pour le voyage et s'adaptant à la diversité des spectateurs et des lieux.

La difficulté et la force de ce choix est de s'adresser à un public très large, enfants ou adultes, initiés ou novices, avec une attention particulière pour ceux qui n'ont que rarement l'occasion d'aller au théâtre. En diversifiant les "terrains de jeux", il s'agit de partager l'idée d'une culture accessible à tous.