Histoire du soldat

Un pauvre soldat vend son âme (son violon) au Diable contre un livre qui permet de lire l'avenir. Après avoir montré au Diable comment se servir du violon, il revient dans son village. Au lieu des trois jours promis, le séjour passé avec le Diable a duré trois longues années. Personne au village ne reconnaît le soldat : pas même sa mère, ni sa fiancée. Le soldat utilise alors son livre magique pour devenir fabuleusement riche. Incapable d'être heureux avec sa fortune, le soldat joue aux cartes contre le Diable : son argent contre le violon. Le Diable gagne, mais enivré par ses gains il se laisse voler le violon.

Ce conte d'inspiration faustienne que Stravinsky puisa dans la littérature russe et dont Ramuz tira un livret d'une poésie à la fois simple et raffinée, fut créé en 1918 à Lausanne.
L'instrumentalisation réduite devait permettre son interprétation au cours d'une tournée dans différents villages helvétiques. Le projet a dû être immédiatement annulé à cause de la propagation de la grippe espagnole. La représentation suivante n'eut lieu qu'en 1924.
Ni cantate, ni opéra, à peine un mélodrame, ce récit lu, vous entraîne dans un monde onirique et surréaliste, cocasse et fantastique, à la manière des toiles du peintre Chagall.
La langue de Ramuz est concise, logique, implacable, tantôt populaire, tantôt incroyablement savante (notamment avec ses rimes internes), bousculée par quelques trivialités calculées.
La musique de scène, désinvolte, étrange, expressive, fait aussi bien appel aux danses à la mode (paso doble, tango, valse, ragtime), qu'aux rythmes les plus irréguliers, sans parler des combinaisons sans cesse renouvelées de l'ensemble instrumental et du rapport musique-paroles. Une prodigieuse réussite où les sonorités les plus originales sont obtenues avec le concours de sept instrumentistes seulement.