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Si près des profondeurs

de Camille Davin , mis en scène par Camille Davin

Le Colombier, Bagnolet

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Un ancien marin de la marine marchande refuse d'embarquer à nouveau mais ne se résout pas à rester à terre, dans un monde qui s'effondre et qui lui échappe.

Il se réfugie seul au bord de la mer, dans cet espace indéfini à l'intersection des mondes, pour tenter de se redéfinir lui-même à travers ses souvenirs.
Le long de la grève, il rencontre un enfant " échoué " là, venu du Darfour au Soudan. Comme le marin, il cherche sa juste place. Ensemble ils réinventent un monde fait de bateaux porteurs d'espoirs qui les ramèneraient vers les êtres aimés laissés en chemin. Tous les deux rencontrent une déesse de la mer qui leur promet de les sauver. Elle est témoin d'une autre vie possible.
C'est un moment d'arrêt, de contemplation dans un espace frontière, entre terre et mer.
Tous les personnages sont des oubliés du monde, le texte les réunit pour qu'ils se rappellent à nous. Anti-héros, délaissés de la mondialisation, leur rencontre autour de l'élément marin est comme une ronde, un conte moderne pour tous, avec en creux l'idée de réinventer le monde. Si près des profondeurs aborde la question de l'exil, de la migration sous un angle plus métaphorique que dans les médias, et offre à l'imaginaire le droit de proposer des réponses magiques.

Entre fable et documentaire, Camille Davin
Ce texte a été nourri de souvenirs et de témoignages de deux marins de la marine marchande et d'un Crieur dans les Côtes d'Armor, après un appel lancé dans les journaux de la région. Je les ai interrogés sur leur " vision " de la mer. Trois témoignages ont particulièrement attiré mon attention, celui de René Prual, Capitaine au long cours, d'Eric Gehannin, également Capitaine, et Jean-Luc Wilmart, ancien Crieur. Une vraie nostalgie se dégageait de leurs paroles. Tous évoquaient un lien plus fort, plus direct à la mer, que les mutations de leurs métiers vers plus de réglementation, plus de modernisation, auraient fait perdre. Chacune de ces paroles fait état d'un désir de plus de poésie, de plus de rêverie, comme une nécessité vitale de sens.
J'ai cherché une possibilité de confronter la parole du marin à une parole porteuse d'espoir. La figure de Yémenja, déesse de l'eau amenée par les Yorubas d'Afrique de l'Ouest au Brésil_ puis associée à la Vierge Marie dans un syncrétisme propre à l'Amérique Latine_ est une vraie figure populaire vénérée au Brésil lors des cérémonies du Candomblé en début d'année. Elle incarne à la fois la mère, la fertilité, la beauté. Dans la pièce, elle révèle au marin l'idée d'une nature profonde commune qui se trouverait dans les profondeurs de l'eau et du corps.

Et puis l'été 2015 a suivi, et la vague de réfugiés a pris en Europe une ampleur sans précédent. Je me suis demandée ce que dirait Yémenja à un enfant venu de la mer, j'ai commencé à écrire des dialogues avec ce troisième personnage d'enfant réfugié. A Paris, j'ai fait la rencontre de Nouraldaim Moussa en 2016, un jeune homme demandeur d'asile, venu du Darfour, à l'Abri Saint-Bernard dans le XVIII ème arrondissement de Paris, dans le cadre de " l'hiver solidaire ". Rencontré dans un atelier sur le masque que nous avons mené avec Camille Olivier et Camille Entratice, il avait le désir de partager son histoire pour qu'elle soit entendue en France, et pour ne pas l'oublier, disait-il. A partir de ses récits, j'ai ajouté la voix de ce jeune homme à celle du marin et réécrit la pièce. Comme les paroles des marins que j'avais interrogés, l'histoire de Nouraldaim était chargée d'histoires magiques et de poésie, révélant un point commun inattendu avec les marins que j'avais rencontré deux ans auparavant. A travers la pièce, j'ai eu envie de dire ce besoin de donner du sens et de la poésie pour supporter les douleurs de l'exil.

Ainsi, la pièce s'est construite avec ces trois archétypes : l'enfant étranger, le marin, la déesse de la mer. Ces voix portées le long des estrans sont l'expression même de la possibilité d'une coexistence de ces trois mondes : le monde postmoderne du marin, le monde de la fin des temps du réfugié qui annonce les catastrophes venues d' ailleurs, et le monde utopique du mythe et de la nature retrouvée avec la figure de la déesse Yémenja. De cette confrontation découle l'hypothèse d'univers multiples, infinis, qui fonctionnent par bifurcation tout en se déroulant dans un même lieu, le bord de mer. L'utopie réside ici dans la possibilité de glisser d'une réalité dense à ces utopies.


Auteur : Camille Davin
Artistes : Fernanda Barth, Mathieu Sacucci, Alexandre Prince
Metteur en scène : Camille Davin





Pour Tout public
à partir de 10 ans

Théâtre contemporain

Langue : Français
Durée : 60 minutes soit 01h00





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