Piano, accordéon, saxophones, flutiau et guitare donnent des accents de jazz et de bal musette à ce spectacle de chanson française pétri d'humour, de tendresse et de poésie. Comme pour desserrer un peu le noeud de cravate de son costume trois pièces, Etienne Luneau prévient dès qu'il entre en scène : C'est juste des chansons... Accompagné de ses deux musiciens qui ressemblent à des enfants qui ont préparé un mauvais coup avec leur copain, il commence à les chanter et à les jouer. Car au-delà des textes et de la musique, c'est dans l'interprétation qu'elles prennent toute leur force : le jeu leur donne ce soupçon de vie en plus qui émeut quand on ne s'y attend pas, qui transporte au-delà des mots et qui fait rire aux éclats. Si bien qu'en les écoutant, en les regardant, on se dit que c'est sans doute un peu plus que juste des chansons...

Juste des chansons, c'est d'abord des textes où les mots s'emboîtent les uns dans les autres avec drôlerie et poésie. On y reconnaît une patte qui est allée tâter du côté de Brassens, Brel ou Ferré, qui a marché dans les pas de Vian et qui gratte la terre où Villon, Corbières ou Prévert sont plantés.
Les textes donnent avec justesse et simplicité de quoi chanter, de quoi rêver, avec cette manière d'outrance qui fait que quand on aime c'est en rouge, quand on boit c'est au tonneau et quand on rit c'est aux éclats.
Ils parlent des amis, des filles, des joies et des ennuis, invitent à aller voir là-bas comme ça brille, racontent des histoires drôles... Ils ont enfin, à l'image de son auteur, les pieds sur terre et la tête dans la lune et ce qu'on y entend en premier, c'est la joie contagieuse qu'il a eu à les écrire.

Juste des chansons, c'est aussi des musiques de toutes les couleurs. La dominante est toute simple : c'est une voix qui fait lalalalère pour que les mots sortent de la feuille, c'est un air que l'on fredonne sans s'en rendre compte et dont on ne se lasse pas, c'est une mélodie familière. Son premier souci est de faire vivre le texte, de lui donner une voix dans laquelle se fondre, si bien qu'on ne sait plus trop si ce sont les mots qui ont choisi les notes et les notes qui ont trouvé les mots.
Et puis il y a des reflets de jazz, de musique classique, de musiques orientales et de bal musette, autant de variations qui donnent un caractère particulier à chaque texte. C'est dans ces variations que l'on reconnaît les musiciens non comme de simples accompagnateurs, mais comme des révélateurs qui utilisent leurs musiques pour mettre les chansons en lumière

Juste des chansons, c'est enfin une manière de les chanter et d'en faire un spectacle. Dans la voix, on entend l'élan qui a fait naître les chansons : elles apparaissent dans toute leur fraîcheur, dans toute leur simplicité, toutes nues. L'interprétation leur donne un costume : en petits gestes et mimiques, elles sont habillées avec délicatesse ou franchement déguisées par des personnages tonitruants.
Et puis il y a ce trio sur scène : élégants comme des maîtres de cérémonie, complices comme trois chenapans qui préparent un mauvais coup et qui semblent dire en riant : " Regardez comme c'est simple, comme c'est amusant, comme c'est joli et comme cela rend heureux de chanter des chansons ! "