Il y a deux Jeanne dans L'Alouette : la Jeanne " officielle ", dont on a consigné les paroles lors de son procès, et celle dont on ne sait presque rien, qui a entendu des voix, douté brièvement, puis persuadé ceux qu'elle a rencontrés de lui faire confiance. C'est celle-ci, la Jeanne " fictive " qui nous a intéressés ; à travers elle le texte d'Anouilh rend sensible quelque chose d'une formidable énergie, d'un élan absolu qui franchit allègrement les cadres du raisonnable et du bienséant.

Le personnage de Jeanne, par la seule force de son désir, parvient à produire de la mobilité, à ouvrir des possibles, dans un contexte où tout semble figé.
En deçà de tout ce que charrie avec elle la figure de Jeanne d'Arc aujourd'hui, chaque scène de ce texte nous pose dans un absolu ici et maintenant, aussi bien lorsque l'enjeu est énorme – convaincre le roi de France – que dans la pure gratuité d'un moment partagé, le simple plaisir d'une odeur d'herbe mouillée.