Jazz, East of the moon avec Pieternel van Oers et Miguel Castro : la rencontre de Pieternel van Oers et Miguel Castro, qui fait se croiser Hollande et Chili, était déjà improbable. C'est possible, puisqu'ils l'ont fait. Leurs deux instruments peuvent l'un et l'autre et simultanément faire les accords et la mélodie ; alors l'un se retire et soutient, puis repasse au premier plan ; ou alors il fait silence, il est là mais de loin, puis revient à l'impromptu, quand les deux ne jouent pas soudain parfaitement ensemble.

Écouter leur disque, c'est d'abord faire l'expérience de cette entente profonde, comme de frère et de soeur, ce miracle d'intimité, possible en musique. Dans un monde qui nous tire sans cesse au dehors, dont c'est même la vocation, qui nous malmène comme une yaourtière, il est bon de revenir à soi pour entendre, passé au creuset de sa vie intérieure et de son art, le bruit du monde, tamisé, épuré, transfiguré, mais aussi de découvrir des espaces où le monde ne peut pas rentrer.

Théâtre, Un jour j'irai à Illeuras avec Ludivine Vauthier : Rosa prépare une fête.
Ce soir, Rosa part vivre sa vie, son rêve de chanteuse loin de sa cuisine et de ses enfants. Avant de leur dire au revoir, entre deux visites inopportunes de ses voisins, à travers différents personnages, elle se souvient. Ces enfants, J1 et J2 dont elle ne voulait pas, Gogui, son amour disparu, ses désillusions. Elle s'interroge sur les immeubles du quartier, le monde qui l'entoure. Elle songe à la traversée qui la sépare des montagnes d'Illeuras et elle chante.

Parce qu'après tout, c'est bien de ça dont il s'agit, une femme éprise de liberté qui part, part, pour se retrouver. "Un jour j'irai à Illeuras", seule-en-scène sensible et poétique, sonde la complexité des sentiments maternels et interroge la façon dont les femmes décident de vivre leur propre liberté face aux conventions sociales oppressives.