Vous êtes conviés à assister graduellement à tout ce qui peut mener au meurtre de Madame. Et ses deux bonnes, devenant elles-mêmes les personnages d'un rituel, se mettent en scène et se montent, avec violence et cruauté, l'une contre l'autre, contre Madame. Une façon, en quelque sorte, de se libérer de l'emprise que leur patronne exerce sur elles et de l'emprise qu'elles ont l'une sur l'autre.

Tout au long de la pièce, il y a d'abord cette réalité théâtrale, celle des bonnes qui sont malheureuses et qui cherchent à lutter contre leur état d'asservissement et de soumission envers Madame. Mais, en contrepartie, il y a peut-être aussi dans cette histoire où se confrontent l'imaginaire et la réalité, des personnages qui se caricaturent eux-mêmes, des personnages qui jouent un jeu : celui d'être l'autre...

Et en prime, il y a aussi un autre jeu perfide, une sorte de cérémonial étrange, de rituel aux accents sadomasochistes. Les bonens, pendant les absences de Madame, jouent continuellement à inverser les rôles. Claire, la cadette, fait semblant d'être Madame, tandis que Solange joue le rôle des bonnes en incarnant à la fois Solange et Claire. Se déchaînent alors des mouvements de haine et de passion d'une intensité surprenante. Ce que le spectateur peut prendre au départ pour une haine et une fascination de deux domestiques à l'égard de leur maîtresse se transforme, au gré des répliques, en une haine/passion que les bonnes éprouvent également l'une pour l'autre.