Suspection

Tous sont laids, bêtes, méchants ou doux, fous, aimants sous le regard cruel et attendri de la portraitiste.
L'actrice donne sa voix aux figures croquées. Récit d'une enfance à la campagne, ponctué de tirs de rafale sur les gueules d'antan;
elle répond aux questions, seule en scène.
La comédienne apparaît bientôt comme acculée, contrainte.
Elle témoigne et raconte ses voisines de classe, ses copines d'école, ses premières amours, les personnages pittoresques du village, le train-train du quotidien de sa province.
Elle dresse des portraits de fantômes du passé, et déballe sous une torture absurde des joyaux d'humanité.
Dans une combinaison qui évoque l'univers carcéral de Guantanamo, l'actrice est installée sur une table en mouvement, questionnée par la voix, rappel de la Stasi. Les images et les sons fusent, l'épouvante affleure.
Le metteur en scène se saisit de cette comédie humaine, lui confère ses obsessions, ses oppressions. Il dessine les costumes et l'espace. Scénariste, peintre, réalisateur de Bunker Palace Hôtel, de Tykho moon ou de Immortel, créateur de la Trilogie Nikopol, de la Tétralogie du Monstre, Enki Bilal associe son univers aux portraits savoureux de Fabienne Renault , mariage de l'anticipation effroyable et de la nostalgie mordante.