Construire la maison
Le fait que j'écrive a à voir avec l'incompréhension. J'écris parce que je ressens un écart. J'écris pour résoudre l'écart entre ma perception et le cours des choses.
J'écris donc à partir d'une question, à la recherche d'une solution. Et lorsque j'écris, assise à mon bureau, je ferme les fenêtres et je décide d'un ordre. J'ordonne ce qui, à l'extérieur, me file entre les doigts. Je décide d'un regard et dépose une sensualité.

Quand j'écris je joue avec l'incompréhension. Je ne prends pas le langage pour argent comptant, mais je le regarde comme à travers une vitre, comme une langue étrangère. J'aime que les acteurs ne sachent pas très bien parler mon texte. Que ce ne leur soit pas naturel et même que ce leur soit dangereux. J'ai envie qu'ils aient peur de parler et qu'on ait peur quand ils parlent.

Le spectacle Bloc tend à rendre compte de ce qui nous terrifie, à savoir la disparition d'un des membres d'une famille, et je souhaite que cette terreur soit une terreur d'enfant, qui tapît sous l'oreiller, ou dans les bras des mamans, comme au cirque.

Alors si la maison est un plateau de cirque, elle est le lieu où s'ordonne la vie, mais aussi où l'on risque sa vie. La maison protège, mais son sol est brûlant. Elle emprisonne aussi, on rêve d'en sortir, de s'en échapper. L 'espace est donc divisé en deux : l'intérieur et l'extérieur de la maison. A l'intérieur on mange, on parle. A l'extérieur on meurt, on erre. L'ordonné et le chaos. Lorsque le fils partira, la maison deviendra un lieu déserté, où la lumière écrase et l'absence étouffe.

Mais le rire permet de reprendre son souffle. Et les blagues sont bêtes. La bêtise heureuse comme issue. La chanson aussi, mais une chanson d'amour. Ca n'est pas très moral mais c'est vivant. "
Jeanne Lepers

Jeanne Lepers :
Actuellement au CNSAD, j'effectue ma deuxième année dans la classe de Dominique Valadié, après avoir suivi les cours de Daniel Mesguich pendant un an. J'ai travaillé cette année avec Christophe Maltot, lors d'un atelier sur l'Histoire du théâtre. Je commence à jouer et à mettre en scène aux conservatoires du Vème et XVIème arrondissements (Bruno Wacrenier et Stephane Auvray-Nauroy) entre 2007 et 2010.

A la suite d'Un Caillou dans la semoule, forme courte que j'écris et mets en scène en juin 2009 au Théâtre du Rond Point dans le cadre du concours d'écriture, je fonde ma compagnie BLOC, du même nom que le spectacle sur lequel nous travaillons à ce moment précis. Entre 2010 et 2012, nous jouons Bloc dans diverses versions au Théâtre Les Déchargeurs, au festival Cithémuses de l'ENS de Lyon, à Un festival à Villeréal, au festival Spectaculaire, à l'Espace 93 de Clichy sous Bois et au Cent Quatre pour le festival Paris Jeunes Talents.
En juin 2011 nous remportons le Prix Paris Jeunes Talents pour notre spectacle Bloc.