Jeux de massacre

"Ionesco imagine ici les réactions de toutes les catégories sociales et de tous les âges devant l'imminence d'une fin inéluctable, programmée ou non, depuis les couches les plus populaires jusqu'à la grande bourgeoisie et les intellectuels, en passant par les truands, les médecins, les hommes politiques, les bureaucrates, les maitres et les domestiques, les représentants de l'ordre...

Angoisse, peur, lâcheté, égoïsme, fuite en avant, négation de l'évidence, irresponsabilité, prédation, domination qui s'en dégage, croyances religieuses, superstitions, ... toutes les attitudes sont développées et caricaturées dans une grande fresque tragi-comique, qui réunit une centaine de personnages dans une vingtaine de séquences faisant appel à tous les registres du théâtre (scènes parlées – chantées – dansées – monologues – dialogues – scènes simultanées – pantomimes – marionnettes -). Le tout dans un rythme soutenu, effréné, et dans un puissant univers baroque fait d'humour noir et de dérision.

La mort, même si elle est inéluctable, est ici envisagée comme une farce clownesque et absurde, qu'il faut toujours repousser, mais qui réapparaît sans cesse, plus terrible, plus violente, plus grotesque.

En conclusion de ce jeu de massacre, au cours d'une scène d'anthologie, deux vieillards tentent de se persuader de la beauté du monde, dans un dialogue bouleversant d'amour, de poésie, d'espoir et d'humanité. Un couple probablement à l'image de Ionesco lui-même et de son épouse Rodica." Hervé Van der Meulen